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L’accessibilité numérique au Canada: simple, utile, et rentable

Rédigé par Karine Simard | 13 novembre 2025 12:44:13 Z

Aujourd'hui on discute accessibilité avec Mathieu Thériault et Rocío Alvarado, spécialistes en accessibilité numérique chez Ciao. Mathieu et Rocío reviennent d'une conférence sur le sujet et partagent leurs impressions.

 

Pourquoi l’accessibilité maintenant?

On vit tous en ligne: prendre un rendez-vous, postuler à un emploi, faire un paiement, lire une nouvelle. Quand un site n’est pas accessible, des personnes restent à la porte—et les organisations perdent des clients, des talents et de la crédibilité. Bonne nouvelle: améliorer l’accessibilité n’est ni ésotérique ni réservé aux experts. Avec quelques décisions claires, une équipe alignée et des pratiques simples, on fait des progrès rapides et mesurables.

Ce que le terrain nous montre

Lors de la conférence A11yTO Conf en octobre, une idée s’est imposée: l’accessibilité cognitive et la santé mentale prennent de l’ampleur. Trop d’animations, des parcours confus, une surcharge d’information—ce sont des freins réels qui augmentent la charge mentale et entraînent des abandons. À l’inverse, des interfaces calmes, une hiérarchie de contenu claire, des libellés explicites et un contrôle sur les animations aident tout le monde, pas seulement une “minorité”. Autre constat partagé: l’accessibilité est un travail d’équipe. Quand PO, UX/UI, développeurs, rédacteurs et QA s’alignent dès le début, on évite les corrections tardives et coûteuses, et on livre plus vite des expériences inclusives.

Le contexte canadien en bref

Au Canada, trois grands cadres guident les organisations:

  • Ontario: la Loi sur l’accessibilité pour les personnes handicapées de l’Ontario (LAPHO) vise l’accessibilité des contenus web (WCAG 2.0 AA, et de plus en plus 2.1/2.2 pour les bonnes pratiques). Les entités visées doivent respecter des standards et rendre compte de leur conformité.
  • Québec: Standard sur l'accessibilité des sites Web (SGQRI 008 3.0), basé sur un alamgame de WCAG 2.1 AA et 2.2, s’applique au secteur public; le privé y gagne aussi en suivant ces règles pour réduire risques et coûts.
  • Fédéral: la Loi canadienne sur l’accessibilité (LCA) exige des plans, de la consultation et des rapports publics, avec un alignement sur WCAG 2.1 AA et la conception inclusive pour les organismes sous réglementation fédérale.

Vous n’êtes pas juriste? Pas grave. Visez WCAG 2.2 niveau AA, adoptez une politique simple et outillez votre équipe pour livrer des expériences inclusives de façon constante.

Ce que votre organisation y gagne :

  • Plus d’utilisateurs qui réussissent leurs tâches du premier coup (moins d’abandons, plus de conversions).
  • Une marque qui attire des talents et renforce la confiance du public.
  • Moins de dette technique: concevoir accessible dès le départ coûte moins cher que corriger après coup.
  • Conformité mieux maîtrisée: moins de risques juridiques et réputationnels.

Votre stratégie en 7 étapes (pratique et réutilisable)

1. Énoncez la vision et la gouvernance

  • Nommez un· ou une sponsor exécutif et une personne responsable (accessibility lead).
  • Rédigez une politique d’une page: périmètre (site/app), standard (WCAG 2.2 AA), rôles (PO, UX, dev, contenu, QA), calendrier de publication.
  • Fixez 3 objectifs trimestriels clairs (ex.: audit des parcours achat et candidature; conformité AA des composants du design system; formation de base pour 100% de l’équipe produit).
2. Faites un diagnostic ciblé

  • Auditez les parcours critiques (s’identifier, acheter, payer, postuler, contacter).
  • Priorisez par impact utilisateur: corrigez d’abord les blocages (navigation au clavier, focus visible, contrastes, alternatives aux médias).
  • Établissez un backlog d’accessibilité avec niveaux de sévérité (critique, majeure, mineure) et responsables.
3. Concevez (ou mettez à jour) un design system accessible

  • Couleurs et contrastes: AA pour le texte normal (4.5:1), AAA pour les petits textes; états (survol, actif, focus) visibles.
  • Typo et mise en page: tailles lisibles, interlignage suffisant, longueur de ligne confortable, hiérarchie H1–H2–H3 cohérente.
  • Composants: boutons, formulaires, modales, onglets, carrousels; sémantique HTML correcte, rôles ARIA pertinents, ordre de tabulation logique.
  • Documentation: incluez des exemples, des anti-patterns, et des critères d’accessibilité pour chaque composant.
4. Respectez les préférences utilisateur

  • Réduisez les animations si le système indique “prefers-reduced-motion”; offrez un contrôle “Arrêter les animations”.
  • Honorez les modes haut contraste et les thèmes système (Windows, macOS, iOS, Android).
  • Préservez la lisibilité en cas de zoom 200–400%; évitez les blocs de texte figés qui débordent.
5. Écrivez du contenu clair

  • Titres descriptifs, phrases courtes, vocabulaire simple; évitez le jargon ou expliquez-le.
  • Liens explicites (ex.: “Télécharger le guide d’accessibilité”) plutôt que “Cliquez ici”.
  • Textes alternatifs utiles pour les images (quoi, pourquoi, contexte); transcriptions et sous-titres pour les vidéos; descriptions pour les visuels clés.
6. Testez en continu (pas seulement à la fin)

  • Clavier: tout doit fonctionner sans souris; ordre logique, pièges évités, échappement des modales via Échap.
  • Lecteurs d’écran: vérifiez titres, listes, tableaux, formulaires, messages d’erreur et feedbacks d’état (succès/échec).
  • Réglages d’accessibilité: contraste élevé, taille de texte, réduction des animations, zoom.
  • Impliquez des utilisateurs aux profils variés (vision, motricité, audition, cognition) dans des tests courts et fréquents.
7. Formez et alignez la culture

  • Ajoutez des critères d’accessibilité aux user stories (“En tant qu’utilisateur au clavier, je peux compléter le paiement sans piège”).
  • Offrez des micro-formations aux PO, UX/UI, devs, rédacteurs et QA; créez un canal de discussion interne dédié.
  • Mesurez, partagez et célébrez les améliorations (baisse du taux d’abandon, hausse de satisfaction).

Téléchargez notre guide pratique sur le cycle de vie de l'accessibilité! Vous y retrouverez:

  • Des conseils concrets pour intégrer l'accessibilité numérique dans vos projets,
  • Des suggestions d'outils pour valider l'accessibilité,
  • Et même une checklist à utiliser dans vos projets!

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Des exemples concrets qui font une différence immédiate (inspirés par les discussions d’A11yTO Conf)

  • Utiliser des titres clairs et des visuels cohérents pour aider les utilisateurs à s’orienter facilement dans une interface ou un document.
  • Prévoir des pauses et des options flexibles lors d’ateliers ou d’entretiens pour respecter les besoins liés au stress, à la neurodivergence ou à la fatigue.
  • Inclure des descriptions longues pour les graphiques et images afin que tout le monde puisse comprendre le contenu, même sans vision.
  • Tester avec des personnes handicapées dès le début, en les considérant comme des utilisateurs à part entière, pas comme des cas particuliers.
  • Éviter de surcharger la mémoire des utilisateurs, par exemple en affichant toutes les informations nécessaires à l’écran sans exiger qu’ils se souviennent d’étapes précédentes.

Ontario, fédéral, Québec: comment s’orienter

  • En Ontario (LAPHO): visez WCAG 2.0 AA pour la conformité formelle; concevez dès maintenant pour 2.1/2.2 afin de couvrir mobile, entrées alternatives et considérations cognitives. Conservez des preuves (rapports, audits, plans d’action).
  • Au Québec (SGQRI): appuyez-vous sur le référentiel (basé sur WCAG 2.1 AA et 2.2). Même dans le privé, suivre ces règles réduit les risques et améliore la qualité globale.
  • Sous réglementation fédérale (LCA): publiez un plan d’accessibilité, consultez les personnes concernées et rendez compte des progrès. Alignez vos critères internes sur WCAG 2.1 AA pour anticiper les évolutions.

Répondre aux objections courantes

  • “C’est trop cher”: corriger un composant non accessible après coup coûte plus que le concevoir accessible dès le départ. Les gains (réduction d’abandon, hausse de satisfaction) compensent vite l’investissement.
  • “Peu d’usagers sont concernés”: beaucoup de limitations sont invisibles ou temporaires (fatigue, stress, migraine, environnement bruyant). L’accessibilité profite à la majorité.
  • “Ça bloque la créativité”: au contraire, des contraintes utiles poussent à des solutions plus simples, cohérentes et performantes.

Passer à l’action cette semaine

  1. Choisissez un parcours prioritaire (ex.: candidature ou paiement) et faites un mini-audit de 60 minutes.
  2. Publiez une politique d’accessibilité d’une page (WCAG 2.2 AA, rôles, échéancier).
  3. Mettez à jour 5 composants clés du design system (bouton, champ texte, sélecteur, modale, menu) pour AA.
  4. Ajoutez un critère d’accessibilité à chaque user story.
  5. Planifiez une courte formation (90 minutes) pour UX, dev et contenu.
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Parlez-nous de votre projet !



L’essentiel à retenir

L’accessibilité n’est pas un projet isolé, c’est une pratique continue. Les discussions d’A11yTO Conf le rappellent: penser au cognitif et donner aux équipes les bons outils change la donne. En Ontario, au fédéral ou au Québec, le chemin est similaire: commencez petit, avancez régulièrement, formez votre équipe, et mesurez vos progrès. Le plus difficile, c’est le premier pas. Le reste? C’est surtout du bon sens, de la rigueur, et un travail d’équipe.

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